Entre 1935 et 1941 ? – Marcel répond au “super-travailleur”

Brouillon d’article rédigé par Marcel et peut-être publié dans la presse ou un organe du parti.

Réponse au “super-travailleur”

    Notre article du 26 novembre n’a pas eu l’heur de plaire au super travailleur. Il se fâche le beau monsieur ! Il n’aime pas la mise en boîte ! Tant pis ! Continuons ! Bien que pulvérisé par la courageuse affiche anonyme qu’il a rédigé si élégamment, je vais lui dire deux mots. Le bougre est terrible. Pensez-donc le voilà qui fait des révélations sur ma vie privée. Eh ! bien, cagoulard mal renseigné, apprend d’abord que je n’ai jamais travaillé à Pantin, ensuite que si j’ai quitté le chemin de fer c’est par démission, pour raison de famille (mort de mon père) et que j’ai si peu été révoqué que je tiens à ta disposition, baveux, ma nomination d’employé aux services centraux 13, rue d’Alsace. Elle est postérieure de plusieurs semaines à ma lettre de démission, laquelle est aussi à ta disposition à mon domicile, menteur !
Citoyens, voyez quels crimes odieux : j’ai les mains blanches et je révise le cadastre ; foutre ! C’est terrible. Savetier miséreux ! en tous cas le miséreux ne t’a jamais rien dû et si mes mains, noires à cette époque, ont gagné leur vie, ce n’est pas grâce à toi. Et surtout encore j’aurais été miséreux, tu n’as pas pu leur De même que ce n’est pas grâce à toi si je suis réviseur de cadastre. Que ce soit grâce à Marius ou à Arthur, ça c’est pas tes oignons. Ce n’est toujours pas grâce à la politique, puisqu’en 1935 (date de mon entrée en service), c’était toi aussi qui tenait le pouvoir. Et si j’y reste, c’est que j’en suis capable, aussi bien que de faire le savetier, ou d’être agent voyer car, pour que tu n’en ignores j’ai aussi été agent voyer auxiliaire, en 1923, en compagnie de M. Richard, lequel est en ce moment à Lure. Tu pourras lui demander. Quant à la façon dont je fais mon travail ça regarde mes chefs, qui ne s’en plaignent pas. En ce qui concerne Staline citoyen, tout le monde sait que je reçois un courrier volumineux de Russie, et que je visite périodiquement le Kremlin !
Mais citoyen attention, il y a pire ! Figurez-vous que je suis de la classe 19 et que j’étais artilleur ! Ah ! çà c’est grave. Et puis, j’ai été à Eltville ! (Il ne sait pas où c’est). Mais oui, j’ai été après guerre à Eltville ! et puis Ce qu’il ne dit pas  c’est que j’ai été aussi avant ça engagé volontaire de juillet à novembre 1918, sur le front, comme agent de liaison au 87° RAL, au Tour (?) de Paris, à Vouziers, à Charpentry, Fléville enfin à  Grandpré.  A cette époque, je faisais dans la boue des plats-ventres, pendant que d’autres tapaient leur petit derrière de doublard sur une chaise à l’échelon, en assurant le ravitaillement de l’arrière !
En ce qui concerne Le 24 septembre, il est vrai que je n’ai pas chialé comme ont fait quelques uns, pour m’en aller n’étant pas patriote professionnel comme ces messieurs de la cagoule, j’ai attendu les événements, comme pas mal de ces derniers leurs amis. Il est vrai que d’autres sont partis, en chialant comme des veaux. Eh ! bien citoyens, j’ose dire que si j’étais parti, ce n’aurait pas été avec la larme à l’œil, même pour aller jusqu’à… Belfort ! Pour ce qui est du mépris, celui des dits “cagoulards” m’honore, et me prouve que je suis dans la droite route. Tant que ces pistolets là nous tirent dessus, ça veut dire que nous sommes dans le vrai. Çà vaut mieux que les approbations que reçoivent d’eux le “faschiste” (sic !) Daladier !
L’amitié et l’estime de mes amis, (qui sont nombreux à Vy-Les-Lure, malgré les dires du “super travailleur”), suffisent à mon bonheur ! Conscient d’avoir toutes les fois que je l’ai pu, rendu service à mon prochain, je peux lever la tête. Ni moi ni les miens n’ont dans leur vie un fait acte qu’ils ne puissent avouer à la face de tous. Il n’est pas donné à tous certains d’en dire autant. La pauvreté des attaques contre moi est la preuve que rien n’a pu être relevé... Les niaiseries qui sont relatées dans le libellé cité plus haut n’entachent en rien mon honorabilité et soyez assuré que si ces messieurs avaient trouvé quelque chose contre moi, ils ne se priveraient pas.
Je ne veux pas abuser des colonnes du “torchon” plus longtemps. Je méprise les lâches et les calomniateurs, et je signe

un salopard : M. Hacquard

a côté des choses que j’ai faites, il y a celles que je n’ai pas faites et ne ferai jamais : ainsi je n’ai jamais fait l’usurier, et je n’ai jamais privé de leur gagne-pain de pauvres bougres.